1 oct. 2013

The Pamir Highway : Act 2

Après avoir pris notre temps à Khorog (qui est au passage une des villes les plus éduquées du pays malgré sa position en plein milieu des montagnes, car le fameux Aga Khan a aussi dépensé 200 millions de dollars pour implanter un des trois campus de la très reconnue Université d’Asie Centrale à Khorog), et être resté un jour et demi, avoir rencontré à nouveau plein de voyageurs, nous repartons sur la Pamir Highway à proprement dit !
En effet, maintenant, la route va rester tout du long en haute altitude !
Après être sortis de la ville, avoir passé un petit barrage opéré par la « Pamir Energy », nous nous retrouvons dans une vallée encaissée avec la rivière Ghunt coulant au fond… encore un des « portails » d’entrée dans la ville (Depuis l’Ouzbekistan, chaque ville a le sien, plus ou moins grand… vous avez du en repérer plusieurs dans les photos précédentes.), une statue de mouton Marco Polo (très gros bouquetin) emblème du Massif du Pamir, des tunnels semi-ouverts avec une fresque commémoratif des 40 ans de l’URSS, nous arrivons au premier checkpoint après une petite descente. A nouveau un village, oasis de verdure dans ce désert minéral.





Belle surprise, la route est toute asphaltée, elle monte presque régulièrement (sans nous faire descendre tout ce qu’on monte…), ça va presque être facile ! Premier objectif : rejoindre le village de Jelondi, dernier village avant le premier haut col à 4200m et l’arrivée sur le plateau du Pamir !
Ah oui ! Et aussi… ça y est ! Il commence à faire froid ! Nous sommes tout heureux de sortir polaires et softshells, enfin ! En fait, il a plu à Khorog très tôt ce matin, des nuages menaçants cachent les hauts sommets et la fin de la vallée, et d’après le garde-frontière, il a neigé à Murgab. Les montagnes autour de nous ont désormais le chapeau recouvert d’un fin manteau de neige qui ajoute à la magie du lieu…
Les villages sont magnifiques, verdoyants, plein de vie, des gens heureux et accueillants,… la vie est simple et difficile l’hiver mais elle suit son cours (Nous essayerons de vous raconter tout ce qu’on a vu dans ces villages). Et puis les paysages autour de nous… les pics enneigés apparaissent, les murs de rochers se succèdent, et au fond d’une large vallée, le ruban de la route suit une rivière aventureuse d’un bleu très clair… palette de couleurs encore une fois !
A midi, un couple suisse, Rosy et Andy, et un anglais, Dan, nous rattrapent, le feeling passe très bien et nous continuons avec eux !













Le soir, nous demandons à camper en arrivant dans une plaine au cœur de la vallée… cette famille nous proposera de dormir dans la maison vide à côté de la leur, et nous offrira thé et pain, une soirée mémorable… encore merci aux pamiris car cette hospitalité et cette gentillesse seront de mises pour toute la suite !!! Pour en savoir plus, lire extrait de vie…
Après un nouveau çay typique (thé noir + lait + sel + beurre) offert par la famille qui nous accueille, nous leur offrons quelques cadeaux (cartes postales, « cartes de visite », couteau suisse ;),…), et remontons sur les vélos. La route serpente toujours en fond d’une gigantesque vallée, le long de la jolie rivière Ghunt (jusqu’à Khorog, nous suivions la rivière Pyang qui marque la frontière entre Tadjikistan et Afghanistan). Nous avons l’impression que les montagnes sont plus petites ici :)… à bien y réfléchir, elles sont toujours aussi hautes (5000 – 6000 m) ! mais c’est nous qui sommes plus haut ! Nous franchissons définitivement la barre de 3000 m d’altitude !



















Encore plusieurs villages, la route monte tranquillement mais sûrement vers la hauteur, notre de pause de midi dans un arrêt de bus nous permet de discuter avec les écoliers. Parlant un anglais parfait pour certains ! Les enfants vont donc pour la plupart à l’école, le matin, parfois au prix de quelques kilomètres de marche, en tenue d’école s’il-vous-plaît ! Parfois très classe !
Nous continuons dans des paysages très minéraux et d’une grande beauté, nous croisons quelques statues symboliques de la faune sauvage du coin, mais tout comme la flore, elle est très limitée et très sauvage en effet ! Les rivières rendent les fonds de vallées très fertiles où les verts jouent avec les jaunes et le bleu de la rivière, couleurs qui tranchent… Depuis Khorog, nous démarrons à 7h30-8h le matin puis roulons jusqu’à la pause déjeuner, et la météo incroyable, très beau temps et température parfaite au soleil (l’altitude amène une température relativement fraîche, autour de 15-20°C, très agréable avec les rayons du soleil qui nous réchauffent), nous permet de repartir tout de suite. Ainsi, dans l’après-midi, nous acceptons une des nombreuses propositions à boire le çay dans une maison en bord de route. Maison en terre habitée par des paysans, une seule pièce, un poêle, et des tissus et tapis colorés. Table basse ronde, tapis au sol, nous nous installons en tailleur autour des tasses de thé et des biscuits et bonbons disposés au milieu. Finalement après une journée de folie, 76km et 900m de dénivelé positif, nous arrivons au dernier « grand » village avant… « la suite » ! Jelondi qui nous accueille avec des sources chaudes pour une fin d’après-midi qui nous voit tous vidés de toute énergie ! Campement monté dans un jardin/enclos pour animaux abandonnés, en bord de rivière… détente…






Le lendemain, nous nous réveillons à 3600m d’altitude, et ce n’est pas la grande forme pour Rosy, nausée, fatigue et vertiges… mal d’altitude ! Et puis, c’est la première nuit où nous utilisons vraiment nos sacs de couchage grand froid ! Enfin ! Il a fait très froid (bien en –dessous de 0°C), tout est gelé au matin, y compris quelques cristaux de glace dans la tente mais nous ça va bien… On prend le temps de la discussion en allant au magasin du coin (nourriture mais aussi vêtements, piles, mécanique, et… une carcasse de mouton laissé à l’air libre avec les mouches qui virevoltent… le tout dans 10 m2 donc pas beaucoup de choix) acheter nos traditionnelles pates, soupes, biscuits,… et même patates, oignons et saucisses cette fois, repas de rois ! Nous décidons de prendre une journée de repos pour s’acclimater à l’altitude…

Matinée rando pour les 3 gars, grimpette sur les sentiers d’animaux vers un pic facile à 4400m, comme à la maison ! A l’exception de la respiration… c’est clair nous sommes en altitude et l’oxygène vient à manquer ! Nous avons le souffle court, sensation nouvelle et bizarre lors d’une randonnée en montagne. Et vues intéressantes sur la vallée, la route et la rivière depuis les hauteurs… ça semble facile la Pamir Highway vu d’ici !
Repos, bons repas (pour l’instant, nous avons encore des légumes…), discussions, et soirée autour d’un feu de camp, tout le monde est en forme !






Puis c’est le grand jour ! Nous partons vers les sommets, au début la route est asphaltée et facile, on monte doucement… depuis hier, nous croisons une grande partie de la famille « Pamir Septembre 2013 » que nous commençons à bien connaître : Claire et Marc, Stéphane et Bakie, Ellis et Willem, Rosy et Andy, Dan, et nous deux, qui se suivont à quelques jours près. Nous grimpons avec Claire et Marc vers les hautes altitudes, ils sont malades malheureusement. La route devient dure, une piste sableuse et très pentue, Sophie et Claire sont crevées, le vent souffle… vers midi, nous atteignons enfin le col à plus de 4270m d’altitude, paysages incroyables et maison perdue au fin fond du monde !
Ensuite, nous enchaînons les montées et descentes, avec deux autres cols à 4200 et 4100m d’altitude, le vent nous pousse parfois, l’asphalte défoncée « facilite » les choses en comparaison de la piste rocailleuse suivit tout du long jusqu’à Khorog.













Comme tous les jours qui suivront, nous croisons une dizaine de voitures (enfin de 4*4, il n’y a plus que ça maintenant !) et de camions par jour, plutôt tranquille comme route… Sentiment de seuls de monde…
L’ambiance devient folle jusqu’au summum lorsque nous voyons apparaître LE plateau ! Une immense plaine fertile parcourue de rivières, de surfaces herbeuses, de lacs salés, à 4000m d’altitude, entourée de sommets enneigés, univers minéral de toutes les couleurs ! Le soleil se couche… nos compagnons sont déjà plus loin… nous décidons de suivre les conseils de plusieurs voyageurs… on prend la bifurcation… une piste sableuse serpentant dans un canyon, suivie par les poteaux téléphoniques… sur les derniers kilomètres c’est la pleine lune qui nous éclairent… jusqu’à Bulunkul ! Justement… paysage complètement lunaire ! Féérique avec cette lune très lumineuse et une fin de coucher de soleil sur le lac aux reflets violacés. Le guide Lonely Planet décrit : « end-of-the-world tadjik settlement »… chacun de ces mots prennent tout leur sens ici ! Encore plus sous la pleine lune… Nous dormons dans une homestay après notre arrivée tardive et une folle journée de vélo ! On nous propose çay, pain, et… macaronis ! Les meilleurs de notre vie ;)
Le lendemain, après un yogurt local, nous découvrons un paysage lunaire sous le lever du soleil… nous sommes bien au bout du monde et nous partons marcher encore plus loin… vers le lac Yashil-Kul : « a surreal turquoise lake framed by ochre desert », encore une fois les mots du Lonely Planet sont tout à fait exacts ! Incroyable ! Nous marchons aussi dans une plaine fertile, au milieu de yacks (ça y est, on les a vu !!!), puis une plage au bord du lac, et une cabane protégeant des sources chaudes :)


























Après un nouveau repas rapide, des jeux avec les enfants et une discussion rapide avec le prof d’anglais (les enfants vont toujours à l’école), nous repartons vers Alichur… et soyons honnête, à partir de là, on en bave ! La piste est très sableuse, obligés de pousser les vélos même sur le plat souvent, puis la route fait de nombreux détours, voir se divise, ça monte et ça descend sans arrêt (de 20, 30, 50m de dénivelé pas plus mais c’est tous les km !)… désert de sable, on croise des touristes en jeep, un « gardien du parc national » en moto,… nous mettrons 4h pour faire 30km et n’arriver qu’au village de Ak-Jar au coucher du soleil. Ici, toutes les maisons sont en ruines… à part une ! De la fumée s’échappe du conduit de cheminée… deux hommes sortent et nous accueillent chaleureusement :)
Comment vous décrire le tout ? … à nouveau maison en terre, une pièce d’entrée non chauffée pour se déchausser et stocker les crottes séchées, puis une seule pièce de vie, cette famille kirghize est très très pauvre… ils nous offrent çay, pain et pâtes (au fur et à mesure, nous découvrons que les seuls aliments sur le Plateau du Pamir sont pain, pâtes, lait et yogurt, pour les plus riches, pommes de terre et biscuits, gluten et lactose uniquement, les corps souffrent avec une telle gastronomie). Tapis au sol (pour s’isoler du sol et pour s’asseoir pour les tapis plus épais), deux meubles et un poêle en fond de pièce, un berceau, et un set de batterie de camion pour faire fonctionner l’unique ampoule LED et charger des téléphones portables qui diffusent de la musique dans toute la pièce !!!
Comme depuis l’Iran, la femme est en retrait, s’occupe du bébé, mange après,… nous développerons plus longuement sur la place de la femme dans tous ces pays musulmans, il y a beaucoup à comprendre ! Le frère qui vit aussi ici s’en va. Les enfants nous sourient et rigolent en nous observant attentivement dans la pénombre de l’ampoule. Le père nous explique qu’il a des rages de dent et que leur bébé a sûrement une maladie mentale. Ils ont le même âge que nous mais en paraissent 15 de plus ! Seule famille à des km à la ronde et sans argent, ils ne peuvent rien faire. Nous voulons leur donner des médicaments, mais nous ne savons pas ce que le bébé a comme maladie et nos médicaments seraient dangereux pour un aussi jeune enfant. Comment leur donner en retour, comment les aider, que peut-on leur apporter ?! Questionnements existentiels d’occidentaux… La situation n’est pas facile à accepter pour nous. Espérons leur apporter un moment qui sorte de l’ordinaire, un peu de bonheur supplémentaire à celui qu’ils arrivent à vivre au quotidien, un message peut être. Nous ne sommes pas là pour rien ce soir… Pour nous message perturbant pour l’instant, pauvreté ou plutôt simplicité extrême de la vie, avec du bonheur malgré tout…
Nous repartons pédaler un peu désemparés le matin dans le froid, après avoir échangé avec eux et joué avec les enfants… nous roulons, nous roulons…







Piste toujours pas bonne, mais après 10km supplémentaires, nous arrivons enfin à Alichur ! Ouf ! C’est le Far West ici ! Des maisons posées par ci par là sur un terrain très désertique… où est le sherif ?! Quelques courses au market, et on repart,… mais les conditions de route de la Pamir Highway continuent de faire souffrir les vélos, Soan, le vélo de Julien, commence à faire du bruit… à peine sortis de la ville, on s’arrête, le disque de frein touche à nouveau la plaquette, dur de rouler ! C’est toujours le moyeu qui prend de plus en plus de jeu et que nous n’arrivons pas à bien resserrer. Même manip que depuis quelques semaines,… avec notre nouvelle pince achetée à Khorog… suspens ! Même coup que le Leatherman quelques jours plus tôt… cassée nette à la première utilisation !!! Rire ou pleurer, on ne sait plus…
Bon… que fait-on… Julien a du mal à se résigner, mais nous retournons à la maison du prof d’anglais d’Alichur qui nous avait proposé un çay… nous passerons la journée à bricoler en plein milieu de l’Himalaya, ce n’est pas le moment !!! (C’est jamais le moment nous direz vous) Nous décidons carrément de changer le moyeu, donc de re-rayonner toute la roue arrière sans appareil adapté… pour ceux qui ne connaissent pas, ce n’est pas une mince affaire si on veut quelque chose de propre et durable ! La nuit tombe, on s’arrête là pour le bricolage, et toute la famille qui nous avait observé pendant la journée, nous accueille pour dormir…
Quelques moments de vie dans ce village perdu dans des conditions difficiles… les enfants vont à l’école quelques heures par jour, il y a même un gymnase où les ados jouent au volley à très bon niveau !, le prof d’anglais a plusieurs camions près de sa maison, et a construit une extension avec faux-plafond bois et éclairage LED dernier cri, les puits parcourent le village et sont partagés (pas d’eau autrement ici), les crottes de vache séchées sont stockées dans les cabanons, le village tout en long en suivant la route Pamir « Highway »…






Il est temps de rattraper notre journée perdue, nous partons sur une route toute droite en faux plat montant. A midi, nous mangeons sous le vent en haut d’un col facile à atteindre, on roule bien ! Nous repartons rapidement, les montagnes sont magiques autour, on se croit aux USA, dans les canyons, beaucoup de couleurs et toujours cette ligne de poteaux électriques… et les yourtes kirghizes ponctuent les paysages. La saison d’été se termine, ils commencent à ramener le combustible (crottes et plantes séchées) vers les villages, à rassembler les troupeaux de chèvres, moutons et yacks dans la vallée, à démonter les yourtes, l’hiver s’installera bientôt et la vie va devenir encore plus dure…






Nous avons le vent en poupe ! Presque 100km plus tard (et oooppp retard rattrapé par rapport au planning qui nous impose de sortir du Tadjikistan avant le 26 !), nous sommes à quelques km de Murgab, il est 16h, une belle rivière entourée de verdure se présente… allez campons ici ! Le terrain de camping est parfait, l’eau un peu froide mais on lave quelques vêtements, la vaisselle, et on prend le temps d’écrire quelques mots pour le blog. Des camions en route pour la Chine s’arrêtent aussi pour la nuit au pied d’une statue de tigre. Bon repas en préparation avec des pommes de terre (le Graal pour nous !) achetée à Alichur… mais Julien ne se sent pas bien… et soudain, il se jette hors de la tente et vomit sur les chaussures !!! Que se passe-t-il ? On passe rapidement à la « purge annuelle programmée » qui a généralement lieu à cette période effectivement… et la nuit le confirmera… plusieurs vomis hors et dans la tente… à l’appart, c’était quand même plus facile à gérer ! On vous laisse imaginer l’ambiance…
Au réveil, ça va mieux même si nous sommes fatigués par cette courte nuit… petite anecdote… le feu se déclare dans un des camions à 200m de là… une bouteille de gaz vide évacuée de la cabine du camion et qui finira de se consumer à l’air libre !!! Alala ces camionneurs !!!

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